Chaque année l’Erdre se pare d’une couleur verte, avec des zones bleu turquoise sur les bords de la rivière. C’est le témoignage le plus visible de l’apparition annuelle des cyanobactéries (micro-organisme potentiellement toxique) ayant une fâcheuse tendance à proliférer avec la chaleur. La présence en excès de phosphore dans l’Erdre est notamment à l’origine du développement de ces micro-organismes. Les cyanobactéries sont les conséquences visibles d’un déséquilibre de la qualité de l’eau.

La « plus belle rivière de France » est un espace fragile, où les collectivités locales tentent de concilier la protection de l’environnement, l’agriculture, l’urbanisme et les loisirs. Dans le but d’étudier le phénomène d’eutrophisation de l’Erdre, nous gérons un observatoire scientifique.

Depuis le printemps 2005, l’Erdre est ainsi « observée » dans le cadre du programme de reconquête de la qualité des eaux sur le bassin versant de la rivière. Cet Observatoire de l’Eau comprend des campagnes de mesures in situ, en complément des réseaux de suivis permanents existants. 

Ce dispositif permet d’affiner la connaissance sur le fonctionnement physico-chimique et biologique du cours d’eau, et également d’analyser les facteurs favorables et défavorables aux proliférations des cyanobactéries. Toutes les données sont disponibles sur le site de l’Agence de l’Eau : https://naiades.eaufrance.fr/

Depuis 2013, nous effectuons aussi en parallèle des analyses d’eau tous les 15 jours entre avril et novembre pour le compte des sept communes riveraines de l’Erdre navigable et du Département Loire Atlantique afin de surveiller la présence des toxines et des cyanobactéries sur la partie navigable de l’Erdre.

Prelèvement analyse

Les cyanobactéries sont des micro-organismes, dont certaines espèces sécrètent des toxines. Elles sont présentes sur la totalité du globe et s’adaptent facilement à leur environnement.

Elles ont tendance à se développer en surnombre sur l’Erdre car c’est une rivière riche en nutriments (phosphore essentiellement). Appelé eutrophisation, ce phénomène entraîne le surdéveloppement de ce phytoplancton. Certaines espèces sont potentiellement toxiques et peuvent avoir des effets nocifs sur la santé.

Cyano-microscope

Leur présence n’est pas systématiquement détectable à l’oeil nu. L’homme peut être exposé aux risques liés aux cyanobactéries par contact avec la peau et les yeux lors des activités de loisirs ou lors d’ingestion d’une eau contaminée. La chaleur favorisant son développement, les risques sont plus importants en période estivale.

Actuellement, la prolifération excessive de cyanobactéries débute dès le printemps et implique un risque permanent pendant plusieurs mois nécessitant des précautions d’hygiène. 

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Le phénomène d’eutrophisation est à l’origine du surdéveloppement des cyanobactéries. C’est un déséquilibre du milieu aquatique résultant d’un apport excessif en nutriments comme l’azote et surtout le phosphore sur l’Erdre. 

 

Les apports en nutriment dans l’Erdre proviennent de deux sources distinctes :

  1. Les activités agricoles, notamment à travers la fertilisation actuelle et passée (y compris les rejets des bâtiments d’élevage) et les transferts de polluants liés aux ruissellements excessifs (réseau de transfert rapide : fossés, rus, drains, etc.)
  2. Le milieu urbain, notamment à travers les rejets des systèmes d’assainissement (déversoirs d’orage, rejets accidentels, défaillances des réseaux…).

 

Sur les bassins versants amont, les flux en azote et phosphore sont dominés par les apports agricoles. Sur l’aval du bassin, les flux en azote proviennent essentiellement du monde agricole tandis qu’en phosphore la répartition est moins tranchée. Sur deux territoires, le phosphore issu de l’assainissement est prédominant (Amont de l’Erdre Navigable et Agglomération Nantaise).

Les apports en phosphore issus du monde agricole sont essentiellement transmis au milieu naturel en période hivernale par le biais du réseau de transfert (fossés, drains, rus, etc.) et la présence de sols cultivés nus ou en début de reprise.

Les apports en phosphore du milieu urbain sont la part nutritive prédominante en période estivale puisque le ruissellement et l’écoulement de la rivière sont très limités.

Cyanobacteries_Vioreau_2017_Crédit_Edenn (1)

Les actions à entreprendre pour rééquilibrer la rivière Erdre sont de plusieurs natures et dépendent de domaines de compétence partiellement ou totalement couverts par des maîtres d’ouvrage multiples et diversifiés sur l’ensemble du bassin versant.

Pour limiter le phénomène d’eutrophisation, le phosphore est l’élément principal sur lequel les efforts de réduction des flux doivent porter car il est le principal facteur limitant pour le développement des cyanobactéries.

    • La mise aux normes des réseaux d’assainissement est l’une des priorités dans la mesure où l’impact du phosphore issu des rejets est prédominant en période estivale et que cette période est propice au développement des cyanobactéries.
    • L’agriculture et l’aménagement du territoire sont la deuxième priorité dans la mesure où ils impliquent des flux de nutriments très importants, notamment durant la période hivernale.
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Plus de détails sur les solutions

La réduction des transferts de nutriment vers la rivière passe par :

    • La baisse des apports en azote et phosphore sur les terres agricoles ;
    • la poursuite des programmes de mise aux normes des bâtiments d’élevage
    • la mise en place zones tampons à l’interface des fossés et du réseau hydrographique.
    • La plantation de haies bocagères en rupture de pente

Les programmes d’optimisation de la fertilisation doivent être intensifiés pour réduire au maximum les transferts de pollution. Cependant, une politique d’aménagement du territoire doit être entreprise afin de fixer les nutriments (azote et phosphore) avant leur arrivée dans la rivière et de réduire les quantités retrouvées dans l’eau.

En parallèle, des actions permettant de rééquilibrer et entretenir le milieu doivent être menées :

    • restaurer ou créer des zones de marais en bordure de la rivière afin d’éliminer le stock de phosphore ;
    • restaurer les ceintures végétales en bordure de rivière (roselières, nénuphars, châtaignes d’eau)

De ce cadre, l’observatoire de l’Erdre, en place depuis 2005, permet de :

    • capitaliser et mettre en forme l’ensemble des données collectées ;
    • réaliser des campagnes de mesure complémentaires nécessaires à une bonne compréhension des phénomènes existants et de leur évolution ;
    • réaliser des bilans réguliers et des suivis des actions indispensables à mener ;
    • valider les résultats obtenus et de les corréler aux conditions météorologiques des années à venir, pour établir des comparaisons d’une année sur l’autre ;
    • coordonner le programme de travaux.

Analyse bandelette

Sur l’Erdre

En 2002, une première étude approfondie à caractère technique et scientifique a été menée par l’Edenn. Elle avait d’une part comme objectif de mieux comprendre les mécanismes d’apparition et de développement des cyanobactéries et d’autre part de trouver des moyens pour les combattre. La réflexion centrée initialement sur l’Erdre navigable a été élargie à l’ensemble du bassin versant de l’Erdre afin d’avoir une vision globale sur la problématique des cyanobactéries.

Cette étude, complété et mise à jour en 2019, a contribué à la mise en place d’un observatoire scientifique, toujours en place aujourd’hui. Elle s’est articulée autour de trois axes :

    • Etude des apports endogènes et exogènes (phosphore et azote) ;
    • Etude sur le développement des cyanobactéries ;
    • Etude des toxines liées aux cyanobactéries.

 

Sur l’étang de Vioreau

Depuis 2004, l’étang de Vioreau à Joué sur Erdre connaît régulièrement des blooms estivaux de cyanobactéries qui ont pu provoquer des fermetures administratives de la plage pour des raisons sanitaires. Par ailleurs, ces blooms provoqués par la dégradation de la qualité de l’eau nuisent au bon état de la conservation des habitats naturels des grèves du plan d’eau.

L’Edenn a alors engagé une étude ciblée sur l’eutrophisation de l’étang afin d’affiner les connaissances sur son fonctionnement hydro-biologique. Ce diagnostic a permis d’identifier les causes de la présence de cyanobactéries en forte concentration, intégrant le poids des apports hydriques et sédimentaires à l’échelle de son bassin versant. L’ensemble des résultats du diagnostic a abouti à l’élaboration, en 2017, d’un plan d’actions hiérarchisées pour tenter de limiter le risque sanitaire liés aux cyanobactéries.

Cette étude, dont les résultats ont été présentés en 2020, fait l’objet en 2024 de compléments par le Département : intégration de nouvelles années de suivi, extension de la zone investiguée, etc.

 

Liens utiles :

https://www.anses.fr/fr/content/les-cyanobacteries-en-questions 

Nous contacter 

Cédric Barguil
technicien Milieux aquatiques
02 40 48 24 42

contact@edenn.fr

Observatoire_Etude cyanobacteries 2019
Observatoire_Synthèse de l'observatoire 2005-2017
Observatoire_Etude azote et phosphore_2003